Sowadikha !

Je suis encore a Ubon, que je quitte finalement demain pour Pak Chang et son parc national par le bus de 9h. Ici, c est un cyber cafe ou la moyenne d age doit tourner autour de 10 ans et demi, casques visses sur les oreilles et yeux fixes sur les ecrans ou se deroulent des jeux allant du doom-like au jeu kawai plein de hello kitty. Une bande de copines se taille des fous rires hurlants depuis tout a l heure en se moquant gentiment de la tenanciere, une ado, qui ne comprend pas ce que jessaye de lui dire (one more hour ! Twenty baths !). Les effluves du night market  tout proche entrent par la glissiere de la porte, odeurs de brochettes, de riz, de nouilles sautees. Celles, plus fraiches, des oignons de printemps ou de menthe restent dans leur stands, mes preferes. Au dessus des poissons fermentes tournent de petites helices de fortune faites de fil de fer et de sac plastique pour eloigner les mouches. Les vendeuses les plus chiches se contentent d agiter un sac plastique accroche au bout d une perche au dessus de leur etal... D autres ont le privilege de vendre des poissons vivant : une fois choisis par l acheteur, elles le sortent prestement et avec agilite de sa baignoire et lui reglent son compte d un energique coup de tube metallique carre bien place.

Les stands eclaires par des ampoules crues proposent de tout et de rien, principalement de la nourriture. POur les plus riches, elle sera sous forme d ingredients a cuisiner; pour les autres ce sera une assiette sur le coin d une table metallique ou un sachet plastique contenant soupe, nouilles ou jus de fruits. Je retrouve les fameux sachets africains a tout faire, source ici aussi d un gaspillage et d une pollution intenses... Tout se vend emballe dans plusieurs couches de plastique, impossible d y echapper sauf peut etre pour les noix de coco, habilement ouvertes de 2-3 coups de machette et dans lesquelles on vous plante une paille coloree.

Le soir du dernier post, j ai vite cavale a la gare pour tenter de trouver d autres voyageurs avec qui partager ma chambre, n ayant toujours pas reussi a joindre Gai. Mission accomplished, et je me suis retrouvee avec un couple d allemands en route pour le Laos. Parfait ! Le lendemain matin, j avais fixe rendez vous a Gai, apres avoir vaguement hesite a quitter la ville sans l avoir vu. Mais non, c aurait ete trop bete. Grand bien m en a pris... Avec Gai, c est la premiere tres belle rencontre de ce voyage que j ai faite... Gai a 22 ans, il etudie l anglais a la fac (ca aide pour la communication, du coup mon niveau d anglais est reparti a la hausse). Il m a accueillie chez lui avec une gentillesse extreme et nous nous sommes tout de suite tres bien entendus comme de vieux amis. Il a une ouverture d esprit et une curiosite rare, c est un vrai bonheur de discuter avec lui. Ce qui a fait que chaque jour j ai repousse mon depart... Je me suis fait trimballer dans toute la ville a dos de scooter, entre temples, marches, potes a lui : un pur regal ! Vraiment belle invention que le couchsurfing, je vous le dis...

Niveau travail, j ai enfin commence : ca n a pas ete facile avec cette grosse tuile du debut, mais j ai rachete du papier et je bricole comme je peux entre decoupages et collages. J ai inaugure mes croquis de plein air aujourd hui lors d une balade a la frontiere avec le Laos, pendant laquelle je me suis fait une certaine notoriete parmi les chauffeurs de moto taxi en les dessinant. Je suis vraiment heureuse de commencer a dessiner, ca m avait enormement manque et pas mal destabilisee aussi de ne pas pouvoir me refugier dans le dessin comme j ai parfois besoin de le faire.

Je trace la suite de ce voyage petit a petit, prevoyant une etape ou deux a l avance mais je vais essayer, meme si ca fait forcement plus peur, de continuer a ne pas tracer d etapes definitives. Voila que je touche du doigt le vrai bonheur et la vraie force du voyage en solo : l independance totale. Je retrouve cette sensation deja connue de liberte grisante, effrayante parfois aussi. Aujourd hui je suis repassee du cote du bonheur... Je commence a trouver mon rythme. J emprunte a Caro son enumeration Sud americaine que j avais tant aimee...

J ai appris a dire je suis vegetarienne en thai. Je lave tous les soirs mes habits de la journee pour qu ils sechent la nuit. Je me lave a l eau froide de bassines puisees dans d enormes reservoirs d eau. Je sais prendre tous les transports en commun, tuk-tuk, moto-taxi, bus ou camionnettes au nom imprononcable. Je commence a connaitre les fruits et legumes des etals du marche a force d en tester chaque jour de nouveaux. Je me prepare mes bouteilles d eau a coups de Micropur. Je mange du riz collant, specialite Isaan, a la main et a meme de grands paniers d osier. Je sais reconnaitre les temples styles Bangkok ou style Lao (pas dur). J assiste a la priere bouddhiste, aigre douce, profonde et stridente a la fois. Je glisse des pieces de 1 bath dans les urnes des temples pour savoir mon futur, et s il ne me plait pas, je froisse le papier et le jette dans une corbeille pour en changer...

Hier j ai jete mon avenir predit par un temple. Je n ai pas encore repioche de papier... Je ne suis pas sure finalement que cela m interesse de savoir.