Khmers Rouges. Un nom que tout le monde connait ici. Ceux qui parlent francais encore mieux que les autres : ils les ont subis dans leur chair. Le Cambodge est un pays a la recente histoire marquee par cette guerre civile et cette periode plus que sombre (2 millions de morts civils estimes entre 1975 et 1979, suivis d une famine et de centaines de morts et de blesses dus aux mines antipersonnel dissseminees dans certaines zones du pays)... Chaque pays que je visite m apprend un peu mieux l histoire et je me plonge dans celle d ici pour mieux comprendre, sentir, savoir.
A Phnom Penh, j ai visite le musee Tuol Sleng, dit musee du genocide. Cet ancien lycee transforme en centre d interrogatoire et de torture par les khmers rouges est aussi connu sous son nom de l epoque : S-21. On estime que 20 000 personnes y sont passes : 7 ont survecu.
Batiments sobres, loin de la didactique et du cote ludique de nos musees occidentaux. Tout est a imaginer, et pour nous europeens impregnes de la Shoah, il faut s affranchir de ce spectre : l enfer peut aussi avoir lieu sous les palmiers, dans une belle matinee ensoleillee. Balustrades couvertes de fil barbele. Agres de gymnastique utilises comme potence. Tombes blanches des 14 corps decomposes decouverts par les soldats vietnamiens a leur arrivee. Salles vides aux carreaux de ciment, murs griffes ou subsistent encore les tableaux noirs, rampes patinees que l on ose a peine toucher. Lits de fer aux sommiers defonces, barres metalliques, entraves couleur sang seche, cellules de bois ou de brique construites a la va vite et par lesquelles on est oblige de penetrer dans d etroits couloirs qui puent l horreur et la mort. Vitrine remplie de vetements poussiereux et miserables. Bidons rouilles, pelles metalliques fendues, barres a mine. Des outils de torture paysans, rustiques, qui font d autant plus fremir. Panneaux couverts de centaines de visages. J y ai releve quelques portraits parmi ceux qui m ont le plus marquee : ce n est pas toujours le temps de rire, en voyage.